Un premier trimestre 2020 qui entrera dans les livres d’histoire

9 avril 2020 

Auteur : Vincent Coppée, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management

Les trois premiers mois de l’année que nous venons de vivre vont longtemps hanter la mémoire des investisseurs. Jamais depuis la crise de 2008 nous n’avons vécu une telle volatilité et de telles perturbations sur les marchés financiers. Tant l’ampleur de la chute des actifs à risque que sa soudaineté ont pris beaucoup d’opérateurs de court.

Avant de détailler les causes de cette crise, nous livrons quelques chiffres en perspective. Ce trimestre a montré deux visages totalement opposés à ce niveau, c’est pourquoi nous faisons la distinction entre les 6 premières semaines de l’année et le reste de la période.

Les marchés d’actions

Rendement en Euro 1.1.2020 au 15.2.2020 16.2.2020 au 31.3.2020 Trimestre
MSCI World (actions mondiales) +6,7 % -24,7 % -19,6 %
S&P 500 (actions américaines) +8,5 % -24,2 % -17,7 %
MSCI Europe (actions européennes) +3,4 % -25,1 % -22,6 %
Topix (actions japonaises) +1,4 % -16,1 % -15 %
Marchés émergents +1,7 % -27,9 % -26,7 %
Chine +4,8 % -11,9 % -7,7 %
Inde +4,9 % -32,3 % -29,1 %

Durant la première partie du trimestre, les bourses ont connu une hausse généralisée. Les Etats-Unis ont signé la meilleure performance, tandis que le Japon fermait la marche. Les marchés émergents ont connu également une évolution plus modeste, à l’exception notable de la Chine et de l’Inde. La bourse américaine a de nouveau pu profiter de l’excellente prestation des sociétés du secteur technologique, alors que l’Europe, le Japon et les marchés émergents ont été relativement pénalisés par le poids plus important dans ces régions des sociétés financières, pétrolières et industrielles traditionnelles.

Après la mi-février, les marchés ont connu une chute violente et rapide partout dans le monde. Elle s’est accompagnée d’une explosion de la volatilité, ce qui est une caractéristique classique d’une atmosphère de panique chez les investisseurs. Ce premier trimestre a le triste privilège d’être le plus désastreux depuis la crise financière de 2008.

Notons cependant la bonne tenue relative de la bourse chinoise par rapport aux autres indices. Nous évoquerons plus loin ce phénomène lorsque nous détaillerons les événements responsables de la crise actuelle. 

Les marchés obligataires

Le marché obligataire, qui est resté stable dans la première moitié du trimestre, a connu par la suite un comportement très différent en fonction des différentes classes de risque associées.

Les obligations d’entreprises ont fortement souffert des vagues de vente panique initiées par les investisseurs. En particulier les obligations de haut rendement (« high yield »), dont la santé financière est plus fragile, ont fait l’objet d’une forte pression vendeuse. Le graphique ci-dessous illustre l’ampleur de la chute dans la zone Euro :  -6,6% pour les obligations d’entreprises de qualité (« Investment Grade ») et -16% pour les obligations de haut rendement. Le manque de liquidité dans le marché a encore aggravé le phénomène, ce qui a rendu indispensable une intervention des banques centrales (voir plus loin).

Obligations d'entreprises Zone Euro

Les obligations des pays émergents ont également sensiblement reculé, sous l’effet de sorties de capitaux, de la chute des prix pétroliers et de la baisse de leurs devises. La baisse avoisine ainsi les 15% en Euro pour l’indice global de la dette émergente.

Les obligations gouvernementales ont connu des fortunes diverses. Comme l’illustre très bien le graphique ci-dessous, lLes papiers émis par les pays considérés comme « valeurs refuge », tels que les Etats-Unis ou l’Allemagne, ont bien mieux résisté, voire progressé, tandis que les pays de la périphérie européenne ou dont la devise a été mise sous pression comme la Norvège ou la Pologne n’ont pas échappé à la baisse. Il est à noter que depuis l’intervention de la BCE et l’extension de son programme de rachats obligataires, les écarts de rendement (« spreads ») entre l’Allemagne et la périphérie se sont à nouveau réduits. Nous le constatons également sur ce graphique avec par exemple la hausse des cours des obligations italiennes.

Cours obligataires Europe + USA, exprimés en EUR

 Les facteurs déterminants du comportement des marchés

Nous devons ici également distinguer les facteurs qui ont influencé le marché au début de l’année et à partir de mi-février.

Les décisions de gestion au sein d’Argenta Portfolio

Voici un détail des décisions de gestion prises dans les fonds au cours du trimestre écoulé:

Perspectives

Tant que la propagation du COVID-19 se poursuit, les marchés resteront volatils. Cependant les efforts concertés menés par les autorités monétaires et publiques partout dans le monde auront tôt ou tard un impact positif et aident à protéger l’activité économique. L’ampleur des mesures prises est en effet inédite et se chiffre à plusieurs points de pourcentage du produit brut mondial.

Par ailleurs les valorisations des bourses sont de nouveau devenues attractives, même en considérant une forte diminution des bénéfices à court-terme. C’est ce qui nous a amené à réinvestir récemment une partie des liquidités que nous avons accumulées.

Dans nos fonds essentiels nous maintenons dans la gestion un équilibre sain, en détenant d’une part suffisamment d’instruments sous-jacents qui servent d’amortisseur lorsque les marchés deviennent plus turbulents. D’autre part nous faisons aussi en sorte d’être positionnés de telle manière que nous pouvons profiter d’un rebond potentiel. Ceci est en effet au moins aussi important.