Continuer à miser en toute confiance sur nos forces au sein de la gestion

24 avril 2020

Auteur : Matthieu De Coster, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management

En maintenant un positionnement neutre dans nos fonds essentiels entre les liquidités, les obligations et les actions, et en privilégiant dans le même temps les entreprises qui contribuent à l’émergence d’une nouvelle économie, nous continuons à miser sur l’avenir dans nos portefeuilles d’investissement.

Une bataille de gagnée

En Italie, le pic de nouvelles contaminations a été atteint le 21 mars, et pour la première fois, le nombre total de personnes infectées a reculé lundi et mardi de cette semaine. L’Espagne a connu, lundi également, son premier jour de recul de cette statistique. Plusieurs pays tels que le Danemark, la Norvège et l’Espagne assouplissent entretemps les mesures de confinement les plus strictes, de même que certains états américains. Il s’agit sans équivoque d’une bataille de gagnée pour la société et l’économie, même si la guerre n’est pas encore terminée.

Des résurgences de l’épidémie ne sont pas à exclure selon les spécialistes. Une étude de l’université de Harvard part du principe que nous devront retourner à des confinements périodiques jusqu’en 2022. Beaucoup dépendra de la mesure dans laquelle nous sommes encore éloignés d’une immunité de groupe(1) dans les prochains mois. La vitesse à laquelle un vaccin sera développé contre le virus sera de même un facteur déterminant de l’évolution future, au même titre d’ailleurs que le nombre de tests effectués…

Philogénie coronavirus

Source : GISAID

Cette carte montre la phylogénie du virus, ou le chemin évolutif de l’organisme. Chaque petite boule représente un examen du DNA du Covid-19. Il est important de cartographier les mutations, ainsi que le chemin suivi par les contaminations. Il apparait ici clairement que le monde de la recherche tourne à plein régime sur cette problématique. La bonne nouvelle est que le virus n’a pas encore effectué de dangereuses mutations jusqu’à présent(2).

Quoi qu’il en soit, afin de prévenir des dégâts supplémentaires au sein de l’économie, la société doit progressivement et de manière responsable se remettre au travail. Le port du masque, les tests massifs, le maintien d’une certaine distanciation, les gels pour mains et d’autres mesures de routine seront ici des facteurs nécessaires à cette reprise.

Le niveau d’incertitude reste cependant élevé

Aujourd’hui, les incertitudes auxquelles l’investisseur est confronté sont nombreuses. Nous ne connaissons pas le chemin exact emprunté par le virus, ni ses potentielles résurgences. De même, la vitesse et l’ampleur de la réouverture de l’économie nous restent inconnus.

De plus, nous ne savons pas bien jusqu’à quel point les entreprises ont été affectées par cette crise ces derniers mois, voire, pour certaines d’entre elles, combien elles en ont profité. Dans des circonstances normales, nous comparons nos prévisions avec les attentes des analystes dans le monde entier, mais eux aussi évoluent dans le brouillard. Dans quelle mesure les entreprises vont-elles, plus tard dans l’année, pouvoir réparer les dégâts encourus au sein de leurs activités ?

Enfin, la réaction des investisseurs à la publication des résultats de sociétés est également incertaine. Vont-ils « regarder par-delà la vallée » ou vont-ils paniquer à la vue des chiffres trimestriels ? Ces dernières semaines en tous cas, un regain de confiance semblait visible.

La meilleure approche en période d’incertitude, c’est de miser sur ses forces 


Faisons en sorte de retirer un maximum de ce que nous savons.

La nouvelle économie

Nous donnons la priorité à nos thèmes de long terme qui, sans surprise, correspondent aux secteurs les moins touchés par la crise. Le secteur technologique et le secteur des soins de santé sont depuis longtemps déjà les plus importantes positions dans nos portefeuilles, bien avant l’arrivée du Covid-19. Ce positionnement résulte de notre choix pour les entreprises qui investissent dans la sécurité numérique, la robotique et le vieillissement, qui comprend les sociétés actives dans la recherche pharmaceutique. Elles seront les piliers de la nouvelle économie. Nous sommes très conscients de l’importance de ces choix sectoriels. Après le confinement, nous travaillerons probablement plus souvent depuis notre domicile, et effectuerons moins de déplacements. Les entreprises qui louent des espaces de travail peuvent réduire sérieusement leurs coûts en organisant un télétravail partiel pour leurs employés et en louant des surfaces plus petites : « attendez, nous n’avons pas besoin d’autant de mètres carrés ! ». Cette dernière remarque, aussi évidente soit-elle, aura un impact important et de longue durée sur le secteur de l’énergie et de l’immobilier.

Les prix pétroliers doivent s’adapter à une nouvelle réalité et cela se fera à des cours d’équilibre plus faibles, probablement de manière durable sous les 50 dollars par baril. Cela signifie, pour beaucoup d’entreprises énergétiques, nettement moins de profits.

Le secteur de l’immobilier commercial fera également face à de sérieux vents contraires, marqués par des faillites et des mesures d’économie qui seront inévitables.

Nous continuons à considérer les investissements dans les hôtels, le secteur aérien, le tourisme et les sociétés liées aux événements de masse comme des opérations à haut risque. Dans quelle mesure en effet, les individus pourront-ils ou voudront-ils s’exposer à l’avenir à des risques accrus de contagion ?

Au sein même des secteurs et des thématiques, nous essayons de déterminer le taux de numérisation de chaque entreprise. Au sein du thème Lifestyle, par exemple, nous nous intéressons à la visibilité « en ligne » de la marque.

L’incertitude n’est pas quelque chose de nouveau, et c’est même la raison pour laquelle les actions offrent de beaux rendements à long terme. On reçoit en effet une prime de risque à long terme comme compensation pour ces périodes intermédiaires d’incertitude. Aujourd’hui cette prime de risque est à sa moyenne historique. Cela signifie que l’on reçoit une compensation correcte pour le risque encouru. Ce dernier argument nous amène à l’allocation d’actifs que nous appliquons actuellement.

Notre positionnement actuel

Aujourd’hui nous avons un positionnement neutre dans nos fonds essentiels entre les liquidités, les obligations et les actions. Il est complété par nos choix spécifiques sur les sociétés. Plus que jamais une gestion active a l’opportunité de faire la différence par sa sélection d’entreprises. Les gagnants et les perdants de l’économie de demain deviennent de plus en plus évidents. Pourtant, le processus de marché n’a pas encore fini son travail : tout n’est pas encore intégré dans les cours de bourse. Les entreprises qui ont actuellement une activité florissante vont probablement la conserver pour une longue période.

Le poids régional le plus important dans nos portefeuilles se situe aux États-Unis. Leur économie est probablement la plus résiliente pour résister à cette crise, soutenue par un processus de décision politique flexible. Le dollar est cependant relativement onéreux selon notre analyse. Il est avantagé par son statut de valeur refuge. La réduction du différentiel de taux entre les États-Unis et l’Europe implique cependant que le dollar est trop richement valorisé. De plus, la perspective d’un rétablissement de l’économie mondiale plus tard dans l’année rendrait les investissements – dictés par la prudence – dans la devise américaine moins nécessaires. À la suite de la baisse des taux et des stimuli fiscaux massifs, nous prévoyons que le dollar s’affaiblira d’ici la fin de 2020. Pour cette raison, nous nous protégeons partiellement contre cet affaiblissement potentiel par l’utilisation d’instruments de couverture.

Nous avons favorablement accueilli le soutien des banques centrales au niveau des obligations d’État. Grâce à ces actions, nous nous attendons à moins d’agitation dans l’Europe périphérique dans les prochains mois. Nous y maintenons nos positions et les renforcons même tactiquement lorsque nous voyons que la différence de taux avec les valeurs refuges telles que les obligations d’état allemandes a augmenté. 

Conclu­sion

Plus que jamais une gestion active a l’opportunité de faire la différence par sa sélection d’entreprises. Les portefeuilles sont construits en choisissant les entreprises sur des critères de qualité. Nous donnons la priorité à nos thèmes de long terme, qui sans surprise correspondent aux secteurs les moins touchés par la crise. Le secteur technologique et le secteur des soins de santé, par exemple, sont depuis longtemps déjà les plus importantes positions dans nos portefeuilles.

Notre attention toute entière est portée vers la gestion attentive et professionnelle des avoirs de nos clients en toutes circonstances, et en particulier dans cet environnement exceptionnel que nous vivons actuellement.

(1) Si la contagiosité du Coronavirus est R0=3 (1 personne infectée en contamine en moyenne 3 autres), alors 66 % de la population doit être immunisée pour parler d’immunité de groupe. À ce niveau, l’augmentation du nombre de contaminations est contenue de manière naturelle.

(2) Dans le sens où le comportement du virus se modifierait ou deviendrait plus dangereux. Le virus se compose d’environ 30 000 « lettres » biochimiques dont on observe actuellement une variation maximale de 40 lettres.

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