L'euphorie cède la place au réalisme

8 mai 2020

Auteur: Xander Michielsen, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management

Les nouveaux cas de COVID19 déclinent jour après jour en Europe. Les entreprises européennes peuvent progressivement entamer leur redémarrage. Aux Etats-Unis, Donald Trump envisage également une réouverture accélérée de l’économie. Cette évolution a rendu la bourse optimiste, parfois même euphorique durant les dernières semaines. Cette tendance ne s’est cependant pas poursuivie cette semaine, et nous avons assisté au retour d’un certain réalisme.

Le nombre de nouveaux cas de Covid19 en Europe et dans les pays anglo-saxons

En Italie et en Espagne, les pays parmi les plus touchés d’Europe, nous constatons que le déclin du nombre de nouvelles infections se poursuit. La tendance est similaire pour le reste de l’Europe continentale. Cette évolution permet aux autorités de poursuivre l’assouplissement des mesures prises précédemment et de donner aux individus plus de liberté de mouvement. Cela ne signale certainement pas la fin de la pandémie. Une deuxième vague de contaminations à la suite de l’allègement des strictes mesures de confinement n’est en effet pas à exclure. Cela ne constitue pas nécessairement un problème, tant que le secteur des soins de santé parvient à gérer le nombre de nouveaux cas. L’assouplissement des mesures permet à l’économie de reprendre des forces. Nous devons cependant garder un regard réaliste quant aux effets à plus long terme sur l’appareil économique. Beaucoup d’entreprises fonctionneront en effet très probablement pendant un certain temps en-dessous de leur capacité maximale. 

Italie: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Italie: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue) 

Espagne: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Espagne: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Dans les pays anglo-saxons, nous ne pouvons pas encore parler de tendance baissière. Tant au Royaume-Uni qu’aux Etats-Unis, le nombre de nouveaux cas semble se stabiliser depuis un certain temps et former un plateau. La raison réside sans doute dans le fait que tant Donald Trump que Boris Johnson ont attendu plus longtemps qu’en Europe continentale avant de prendre des mesures de confinement. Entre-temps, le président Trump augmente la pression pour réouvrir l’économie américaine. Boris Johnson, qui a séjourné aux soins intensifs après avoir contracté le virus, est devenu depuis lors beaucoup plus prudent concernant l’allègement des mesures de confinement.

Etats-Unis: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Etats-Unis: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Royaume-Unis: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Royaume-Unis: Nombre de nouveaux cas de Covid19 (ligne bleue)

Tout n’est cependant pas accueilli de manière positive

Nonobstant l’optimisme ambiant autour du nombre de nouvelles infections en recul en Europe et du redémarrage par étapes de l’économie, des signaux moins positifs sont apparus cette semaine et ont brièvement inquiété les marchés.

Des doutes sont apparus en Europe lorsque la cour constitutionnelle allemande a émis des réserves cette semaine sur l’utilité et la proportionnalité du programme de rachats obligataires de la BCE. Cette dernière permet grâce à ce programme aux pays européens d’émettre plus facilement de nouvelles dettes et d’emprunter à un taux plus faible sur le marché obligataire. Une grande partie des obligations est en effet rachetée par la BCE. La remise en cause de ce programme a provoqué un regain d’inquiétude. Les marchés ont cependant assez vite réalisé que cette nouvelle n’était pas si dramatique qu’initialement redouté, même si la symbolique et le timing de ces commentaires est assez regrettable. La déclaration allemande concerne en effet uniquement le programme de rachat initialisé en 2015 et qui s’est terminé en 2018, et non les récents rachats destinés à aider les pays les plus touchés pendant la crise pandémique. La cour allemande a donné trois mois à la BCE pour défendre son programme. Il est dès lors trop tôt pour tirer des conclusions et nous devons attendre la réaction de la banque centrale à ce sujet.

Aux Etats-Unis, Donald Trump a une nouvelle fois accusé la Chine d’avoir volontairement disséminé le virus COVID19. La propagation serait partie d’un laboratoire situé dans Wuhan. Les relations entre les Etats-Unis et la Chine risquent en conséquence de se dégrader de nouveau. Les souvenirs douloureux de la guerre commerciale refont surface, et les marchés ont à leur tour décroché. Relancer les entraves au commerce dans le contexte actuel témoignerait d’un manque de perspicacité économique. Nous voyons cette réaction plutôt comme une tentative de Trump de se dédouaner de toute responsabilité dans l’optique des élections présidentielles. Nous suivons de près ce nouveau développement.

Quelles opérations avons-nous effectuées dans nos fonds essentiels ?

Nous ne sommes pas euphoriques mais réalistes: c’est pourquoi nous conservons une vision neutre au niveau des actions. Concrètement, cela signifie que le poids en actions est resté stable par rapport à la semaine précédente. Le soutien observé de la part des autorités monétaires et politiques en combinaison avec le redémarrage par étapes de l’économie européenne nous incite à un optimisme modéré. Après la révision des chiffres de bénéfices attendus, les primes de risque se maintiennent légèrement au-dessus de leur moyenne historique. Cela procure à l’investisseur en actions un amortisseur qui est probablement justifié dans cette période incertaine. Durant la hausse de ces dernières semaines, nous avons systématiquement vendu des actions pour ramener le portefeuille d’investissement en ligne avec notre vision neutre.

Nous pouvons plus que jamais faire la différence par la composition du portefeuille d’investissement. Un choix délibéré est fait en faveur de nos thèmes de long terme qui se sont montrés par ailleurs plus résistants durant cette période. Nous avons ainsi renforcé, au sein de notre allocation en actions, les positions dans les thèmes du vieillissement, de la fintech, de la robotique et de la sécurité.

Nous avons également décidé d’activer une partie des liquidités conservées jusqu’à présent en les investissant dans des obligations d’entreprises européennes de qualité. Ce segment du marché obligataire s’est à présent stabilisé et offre une opportunité en raison d’un rendement courant plus élevé. Nous avons conscience que diverses entreprises se verront attribuer un rating de crédit moins favorable dans les prochains mois. Cependant, le fait que la BCE ait annoncé maintenir son soutien aux marchés du crédit par l’intermédiaire de son programme de rachat nous offre ici un filet de sécurité supplémentaire.

Conclu­sion

Il est important en tant qu’investisseur de rester réaliste et de ne pas se laisser emporter par l’euphorie ou un pessimisme exagéré. Nous nous attelons à construire un portefeuille d’investissement largement et mondialement diversifié, avec une vision d’avenir. Dans les prochains mois et les prochaines années, nous verrons de grandes différences entre les secteurs et les régions géographiques. Il y aura des gagnants et des perdants. Les investissements thématiques ont déjà démontré leur intérêt durant la période actuelle. Les fonds essentiels profitent d’une part du marché haussier mais maintiennent également un amortisseur lorsque la situation se détériore. Ceci résulte dans un portefeuille d’investissement équilibré.

Notre attention toute entière est portée vers la gestion attentive et professionnelle des avoirs de nos clients en toutes circonstances, et en particulier dans cet environnement exceptionnel que nous vivons actuellement.

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