Après l’épisode volatil, le rallye de Noël ?

5 décembre 2025

Auteur: Sebastiaan Grenné, gestionnaire de fonds chez Argenta Asset Management

L'incertitude quant à la politique de la banque centrale américaine, la montée des tensions géopolitiques, la plus longue paralysie de l'administration américaine de l'histoire et les inquiétudes liées à une possible surévaluation des grandes entreprises technologiques ont rendu les marchés boursiers particulièrement volatils en novembre. Après une forte hausse des actions mondiales au cours des six derniers mois, les trois premières semaines de novembre ont été marquées par une correction brutale.

Au cours de la dernière semaine, le sentiment s’est toutefois amélioré, grâce aux signaux émis par les gouverneurs de la Fed indiquant qu'une baisse des taux en décembre restait possible, et aux annonces des grandes entreprises technologiques spécialisées dans l'IA concernant une augmentation de leurs investissements dans les infrastructures. Est-on parti pour un rallye de Noël ?

Dans cette mise à jour, nous abordons les événements clés du mois de novembre et concluons par un aperçu de nos décisions d'investissement et de notre positionnement au sein des fonds essentiels.

  1. Que s'est-il passé dans le monde ?
  2. Comment les marchés ont-ils réagi ?
  3. Notre positionnement dans les fonds essentiels
  4. Conclusion

Que s'est-il passé dans le monde ?

La paralysie des services gouvernementaux américains

La paralysie des services gouvernementaux américains a rendu difficile la publication de nombreuses données macroéconomiques le mois dernier. De nombreux indicateurs n'ont pas été publiés car les fonctionnaires chargés de la collecte et du traitement de ces données n'étaient pas rémunérés.

Ce shutdown a été provoqué par l'incapacité du Congrès à s'entendre sur le budget futur. Cette situation a eu un impact négatif direct non seulement sur l'économie – en raison de la suspension temporaire des paiements de milliers de fonctionnaires et de l'atmosphère d’incertitude accrue – mais aussi sur les marchés. Les investisseurs étaient contraints de travailler avec des informations limitées, ce qui a encore davantage pesé sur leur sentiment.

Ce que nous avons toutefois pu constater, c'est que le marché du travail américain ralentit, même s’il est loin de s’effondrer. Après plusieurs mois de créations d'emplois décevantes, 119.000 nouveaux emplois ont été ajoutés en septembre. Parallèlement, le taux de chômage a augmenté pour atteindre 4,4 %.

Malgré ce ralentissement, les consommateurs américains continuent de dépenser activement pour le moment. Cependant, leur confiance commence à décliner sensiblement. La situation contraste avec celle de l'Europe, où les consommateurs semblent s'adapter à la conjoncture économique difficile mais conservent leur confiance pour l'instant.

Risques géopolitiques élevés

Outre la volatilité des marchés boursiers, le mois de novembre a également été marqué par d'importants développements géopolitiques qui nécessitent une surveillance étroite, compte tenu de leur impact potentiel sur l'économie mondiale et les marchés financiers.

Le président Trump a présenté un nouveau « plan de paix » pour l'Ukraine, avec une échéance initiale fixée aux alentours de Thanksgiving, désormais dépassée. Cette proposition stipule que l'Ukraine devrait faire d'importantes concessions, notamment céder du territoire et limiter ses capacités militaires. En contrepartie, la Russie cesserait ses attaques. Trump a indiqué qu'en cas de refus, l'aide américaine à l'Ukraine pourrait être suspendue.

Les dirigeants ukrainiens et européens ont, pour l'instant, jugé ce plan inacceptable. Les pays européens ont depuis lors soumis une contre-proposition. L'évolution de ce processus reste incertaine, mais les chances d'une percée diplomatique ce mois-ci semblent légèrement plus élevées qu'auparavant.

Les tensions géopolitiques s'intensifient également sur le continent américain. L'armée américaine intervient de plus en plus fréquemment contre les embarcations de trafiquants de drogue présumés et les neutralise par la force. Parallèlement, la présence militaire dans les Caraïbes a été considérablement renforcée.

Le Venezuela, en particulier, est sous les feux des projecteurs. L'administration Trump a qualifié le président Maduro de chef d'une organisation terroriste et a laissé entendre à plusieurs reprises qu'une intervention militaire est possible.

On observe également de nouveaux développements géopolitiques en Asie. Au Japon, SanaeTakaichi est la première femme élue Premier ministre du pays. Cependant, ses prises de position nationalistes affirmées suscitent déjà des tensions avec la Chine. Par exemple, elle a récemment déclaré qu'une attaque chinoise contre Taïwan constituerait une menace existentielle pour le Japon, auquel cas ce dernier serait contraint de réagir. Cette déclaration a provoqué de vives réactions de la part de Pékin.

La banque centrale américaine

Les actions de la banque centrale américaine ont fortement influencé les marchés boursiers en novembre. Les investisseurs anticipaient une nouvelle baisse des taux pour soutenir l'économie et les marchés, mais l'incertitude quant à une éventuelle baisse en décembre s'est progressivement installée.

Après la baisse de taux de 25 points de base le 29 octobre, les anticipations sont restées très fluctuantes. Les contrats à terme sur la Fed, qui indiquaient une quasi-certitude d'une nouvelle baisse, la considèrent désormais comme une possibilité très lointaine. Au sein même de la Fed, des divisions persistent : certains gouverneurs préconisent un soutien accru pour dynamiser un marché du travail en difficulté, tandis que d'autres avertissent que l'inflation reste supérieure à l'objectif.

La récente paralysie des services de l'administration américaine complique encore davantage la situation. Faute de données macroéconomiques cruciales, la Fed et les marchés naviguent avec une visibilité limitée.

Comment les marchés ont-ils réagi ?

Une pause agitée sur les marchés d’actions

Les marchés boursiers ont souvent connu un parcours mouvementé cette année, et le mois de novembre n'a pas fait exception. Après un fort rebond de l'indice MSCI World depuis son point bas de fin avril – au plus fort de la guerre commerciale – la progression s'est enrayée en novembre. À la fin du mois, nous nous retrouvons ainsi à peu près au même niveau que début novembre.

Cette apparente stabilité s'est toutefois accompagnée de fortes fluctuations. Durant les trois premières semaines, les marchés boursiers ont chuté brutalement, principalement en raison des craintes liées à une possible bulle spéculative dans le domaine de l'IA et de déclarations critiques provenant de la Réserve fédérale américaine. Un rebond s'est amorcé la dernière semaine, permettant de récupérer en grande partie les pertes. Novembre n'a donc pas été un mois calme, mais plutôt une brève pause dans une année volatile.

Les marchés financiers

Nous considérons le récent repli des cours boursiers, notamment ceux des entreprises liées à l'IA, comme une correction saine plutôt que comme le début d'un krach. L'intelligence artificielle est une technologie à fort impact, encore à ses débuts. Les investissements dans l'IA continuent de croître fortement, comme l'ont une fois de plus démontré les résultats trimestriels de Nvidia. L'entreprise a dépassé les prévisions de bénéfices, pourtant très élevées, des analystes, et ses clients continuent d'investir massivement dans de nouvelles infrastructures d'IA.

La question demeure de savoir si le rythme actuel des investissements en capital peut être maintenu, voire accéléré. Pour l'instant, la réponse semble être affirmative. Pour les modèles les plus connus, tels que les LLM (Large Language Models) comme ChatGPT et Gemini, plus la puissance de calcul est importante, meilleurs sont les résultats. D'autres modèles d'IA présentent également un potentiel de croissance significatif. Nous supposons donc que le cycle des investissements en capital n'est pas encore terminé.

Il sera intéressant d'observer comment ces investissements dans l'infrastructure d'IA se traduiront par des gains d'efficacité significatifs. Le secteur pharmaceutique en est un exemple : des entreprises comme Eli Lilly et Novartis investissent actuellement dans des laboratoires d'IA. L'IA, système de reconnaissance de formes le plus performant à ce jour, peut aider les entreprises pharmaceutiques à découvrir plus rapidement de nouveaux médicaments, avec des taux de réussite plus élevés et des coûts de R&D réduits.

MSCI World in Euro

Notre positionnement dans les fonds essentiels

Nous prévoyons que la croissance économique américaine restera relativement robuste en 2026. Nous anticipons que les banques centrales poursuivront une politique monétaire plus accommodante, tandis que les investissements dans l'intelligence artificielle continueront de progresser. Dans ce contexte, nous avons profité de la récente correction des marchés boursiers pour renforcer progressivement notre légère surpondération en actions.

Conclusion

Novembre a été un mois de contrastes : volatilité des marchés boursiers, tensions géopolitiques croissantes et incertitudes quant à la politique monétaire américaine. Pourtant, les fondamentaux restent solides. Nous prévoyons que l’économie américaine restera résiliente en 2026, grâce à des politiques de soutien renforcées des banques centrales et à la croissance continue des investissements dans l’IA.

Dans ce contexte, nous avons encore accentué notre légère surpondération en actions et réalisé des prises de bénéfices sélectives sur les positions à risque accru, comme celles sur les petites capitalisations britanniques. Sur le marché obligataire, nous avons réintroduit des obligations d'État françaises, compte tenu de leurs spreads attractifs.

Pour les investisseurs, la diversification et l'accent mis sur la qualité restent essentiels dans un environnement qui offre des opportunités, mais présente aussi des risques.

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